1097. Les Séditions de Karl Mengel par Alexandra Varrin.
Par Léo Scheer, vendredi 11 septembre 2009 :: #1097 :: rss
Oui, j'avais oublié de mettre en ligne le premier billet consacré au livre de Karl Mengel, celui d'Alex sur son blog le 25 août.
"Who the fuck is Karl Mengel ?
En dépit de quelques ridicules tentatives visant à intituler quelques fausses pistes, nul ne le sait vraiment. Et ce ne sont pas les fragments dicibles des Séditions qui nous aideront à y voir plus clair.
Les Séditions ne s'encombrent pas de convenances, de présentations formelles, d'une structure narrative classique ni même s'un décor avec lequel on pourrait se familiariser.
Vous êtes dans la nuit, noire, à espérer vaguement que vos yeux finiront par s'habituer à l'obscurité et, qu'à terme, vous y verrez quelque chose.
Et puis un éclair, vif, qui zèbre le ciel et qui vous éblouit.
Vous avez tout juste le temps d'entre-apercevoir le lieu dans lequel vous vous trouvez que, déjà , vous replongez dans l'obscurité.
Vous n'avez pas le temps de vous interroger, de vous demander si vous avez bien vu ce que vous croyez avoir vu, car un autre éclair vous aveugle et c'est un nouveau décor qui s'esquisse sous vos yeux, qui s'ouvrent de plus en plus grand à mesure que vous tournez les pages.
Le personnage que vous pensez suivre est une sorte d'espion, d'agent, de mercenaire, au service des uns, mais des autres aussi. Son but et ses motivations n'importent pas tant que le fait qu'il agisse, radicalement, constamment, qu'il se propulse dans l'action pour ne se laisser, ni à lui ni aux autres, aucune piste de réflexion. Ou alors beaucoup trop.
On a tendance à penser, et souvent à raison, qu'il est périlleux de maintenir un juste équilibre entre le trop et le pas assez.
Karl Mengel ne s'en embarrasse pas et les englobe tous les deux, avec une audace ingénieuse, dans ses Séditions.
Le personnage aux multiples identités voyage à travers le monde, imperturbable, mène à bien ses missions, se laisse parfois hanter par quelques souvenirs et/ou convictions récurrentes mais ne nous laisse jamais le temps de nous faire une idée bien précise de qui il peut être et ce à quoi il peut bien aspirer.
Il est un masque, dissimulé sous un masque, dissimulé sous un autre masque, avec une limite en plus l'infini en abscisses et en ordonnées et un sourire narquois et magnanime au croisement des deux axes.
Lorsqu'on en vient à le penser irritant de perfection, autant dans sa maîtrise de l'écriture que dans son cynisme complaisant, il nous surprend aussitôt en nous dévoilant une nouvelle facette, peut-être un peu plus enfouie, s?urement beaucoup plus touchante et achève de neutraliser nos velléités de décryptage en nous rappelant bien qu'il est avant tout lucide, sur lui même et aussi sur nous, qui le lisons, parce qu'il a parfaitement anticipé notre cheminement intellectuel dans la chronologie de ses fragments.
Il y a du Sean Bateman chez Aloïs Hiller, avec la froide lucidité du grand frère en plus et, malgré cette cruelle conscience de sa propre vacuité, on devine une féroce volonté de s'accrocher au soi et à ses convictions.
Il paraît qu'il faut se perdre pour mieux se retrouver ; finalement, c'est peut-être en acceptant de se trouver qu'on comprend qu'il n'y a pas d'autre choix que celui de se perdre.
Si vous faisiez part à Karl Mengel de votre envie de le connaître un peu mieux, il est fort probable qu'il vous fasse la même réponse que celle de Lauren Hynde à Sean Bateman : "Tu ne peux pas. Tu ne me connaîtras jamais, personne ne connaît personne."
Alexandra Varrin. Alex in wonderland (bipolaireadonf) Le 25 ao?t 2009.
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