À l’âge de 9 ans, la narratrice de Place Colette est
victime d’une erreur de diagnostic qui la cloue
sur un lit d’hôpital, le corps prisonnier d’une
coquille de plâtre. Au terme de trois années de
calvaire, un professeur finit par découvrir la
véritable maladie ; il l’opère et la sauve.
La jeune fille a passé ce temps immobile à découvrir
la littérature et les textes classiques. Elle voue
une passion sans limite au théâtre. Revenue à la
vie, elle tourne autour de la Comédie-Française
et de la place Colette. Le jour de ses 13 ans, elle
entre dans la loge d’un comédien dont elle est
tombée amoureuse. Bien qu’il ait trente ans de
plus qu’elle, elle lui propose de devenir son
cadeau d’anniversaire.
Ce roman, qui aurait pu s’intituler Détournement
de majeur, est l’histoire d’une double initiation,
à l’amour charnel et à la passion du théâtre.
Écrit à la première personne, il est pourtant aux
antipodes de ce que l’on qualifie d’autofiction :
le mensonge enveloppé dans une rhétorique de
vérité. C’est un « roman-vrai », où l’auteur se
cherche et finit par faire tomber le masque.
Extrait
« Aujourd’hui, c’est mon anniversaire. »
Cette annonce un peu brutale le prit au
dépourvu. Je vis, au mouvement de ses yeux,
qu’il cherchait une posture, une expression qui
ne trahirait pas son émotion. Le seul mot d’anniversaire,
ma tenue provocatrice, tout le renvoyait
à ce qui lui interdisait de me désirer, à ce qui
l’empêchait même d’imaginer qu’il pourrait
m’aimer. Ce fut la seule et unique phrase que je
parvins à prononcer. J’aurais eu envie d’ajouter,
pour détendre l’atmosphère : « Au secours,
Phèdre, au secours ! » mais je trouvai que j’en
avais assez dit comme ça et restai muette, attendant
sa réplique.
« Ah oui » fut sa réponse, puis, me regardant
droit dans les yeux :
— Et qu’est-ce qui te ferait plaisir, pour un
si grand jour ?
— Que vous m’embrassiez.